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lundi 26 avril 2010

Quelle que soit la taille de la bouche, les miettes ont la même taille...

CHAPITRE 1 : Sheejhaumn trouve sa monture ...


Petit poussin joli
Chante, chante, aujourd’hui
Petit poussin joli
Pleure, pleure car cette nuit
Petit poussin rôti
Nos estomacs seront remplis.

Je l'ai tué de mes propres mains, écrasant sa cervelle entre mes doigts puissants. Sur la table le sang se répand lentement. Les veines du bois arrêtent sa course, impuissantes, pour un instant seulement. Je n’aurais jamais cru qu’il y en aurait tant dans ce petit corps. Ce liquide, tout plein de la chaleur fugace de la vie qui s’en va, je me retrouve cette fois encore à le lécher. Je dévore ma proie, pas le temps de la cuire. La lande s’ouvre devant moi et mon cheval hennit.

Les maisons brûlent,
Les femmes crient,
Les lames s’abattent,
Les enfants fuient,
Les hommes combattent,
Les hommes défaillent.

Ma lame est la plus forte. Si mon âme s’égare, qu’importe. Je suis seule depuis longtemps, depuis toujours. Les créatures dans mon sillage sont couchées le flanc ouvert. Yeux exorbités, bouches béantes. Leurs cadavres jonchent le sol. Je ne sais plus pourquoi je tue. Comme je quitte la lande sanglante, je ne me retournerai jamais.

Pluie, vent et tonnerre,
Et le temps changera.
Ouragans ou éclairs,
Les gens ont peur de tout.
S'il en reste un debout,
Par ma lame il mourra !

Dans les forêts de givre, ma monture est nerveuse. Le sang bat mes tempes, mes muscles se raidissent, la glace craque sous les sabots. Ils m’encerclent puis m’assaillent mais je suis plus rapide. Dix grosses bêtes à poils longs, à l’aspect cauchemardesque, gisent à mes pieds. Sur mon épée, leur sang épais dégouline. Je passe mon chemin.

Vaï ! Vaï ! Petite fille
Les dieux eux-mêmes t’ont-ils choisis ?
Vaï ! Vaï ! Même ton étoile
Connaîtra ton étreinte létale.
Vaï ! Vaï ! Un jour viendra
Celle qui se couchera c’est toi !

Le pays de glace m’accueille avec la froide caresse d’un vent cinglant. Tout plein de neige et de brume ce paysage semble irréel. On ne peut savoir ce qui se profile à l’horizon avant de se trouver tout près. Ici aussi des corps vont tomber. La mort rôde à mes côtés. Mon cheval tombe, je le mangerai.

Mes bottes en cuir sont belles
Toutes couvertes de sang
Elles ont tant fait de guerres
Nul ne leur cherche querelle
Car la chose qu’elles préfèrent
C’est le sang des enfants.

Village mis à sac. Le sang sur la neige devient translucide. Je nettoie arme et mains dans cette poudre blanche. Elle se souille de rouge. Comment laver mon âme ? Du bruit, encore ! Un monstre me fait face, tout effrayant qu’il est, il devra me servir car je digère ma monture. Sa musculature puissante et ses dents de prédateur me menaçant sont la promesse de nombreux carnages à venir. C’est un jour faste !

Fixe-moi dans les yeux
Et soumets-toi à moi !
J’ai des pouvoirs de dieux
Tu me suivras, ma foi.
Mort et désolation
Dans nos pas ils trouveront !

Brave bête…


CHAPITRE 2 : Os broyés et proies hurlantes, Sheejhaumn s’exalte !

Coup de griffe, coup de sang,
Un autre tombe encore.
Coup de patte, coup de dents,
Ma monture carnivore
Coup de lame, coup tranchant,
Avidement le dévore.

Dents et lame de concert arrachent âmes et vies. Je sens le métal frémir de plaisir quand ma hache sème le chaos. Elle est le seul indice que je possède pour comprendre qui je suis … qui j’étais avant de me réveiller seule dans cette demeure que j’ai quittée au grand galop.

Mon arme plantée en lui, l’ennemi se débat.
Je l’écarte du pied, continue le combat.
Il est gagné d’avance, alors quelle importance ?
Qu’il soit encore en vie, mon adversaire mourra.
Je fais ce qui me sied, les têtes rouleront bas…
Au diable la prudence, je ne suis que violence !

Je regarde combattre cette créature qui m’accompagne… ressentant combien, inlassablement, elle se languit de sentir craquer sous ses crocs les os de ses victimes, de sentir leur sang chaud et épais lui emplir la gueule. Elle aime entendre hurler ceux qu’elle déchiquette. Plus je marche avec elle, plus il me semble la comprendre... Ou serait-ce l’inverse ? Elle sent les choses aussi bien que moi, le danger, la peur, cette passion dévorante qui mène au chaos ! Elle m’offre de belles batailles. Je lui donnerai un nom de guerrier. Eschann, le dévoreur.

Une flamme dans mon corps
Fait briller tout mon être.
Je brûle même au dehors,
Perlent des larmes de sang,
Et je me sens renaître,
Sans comprendre comment…

Cette nuit-là, mes yeux brillèrent et une aura étrange se mit à luire dans les ténèbres. Les flammes couleur de sang m’entouraient, léchaient ma peau, la neige fondait autour de moi. Un nuage de vapeur sanglante se levait, aussitôt emporté par les vents. Eschann me montrait les dents … apeuré, puis me souriant presque.

Un rictus de démence
Déforme mon visage.
J’ai la tête qui me lance,
Du sang au bout des doigts.
Aussi loin que je voie,
Des restes de carnages.

Toujours les batailles, et entre les deux le calme, le vide, puis la marche, l’attente, la hâte de tuer, cette rage qui monte grondante, et cette envie qu’on sent sourdre du plus profond de son être, irrépressible… inextinguible. Eschann court à en perdre haleine, jusqu’à ce que ses crocs n’enserrent sa nouvelle victime. C’est un jour sanglant.

Ses yeux brillent comme les miens,
Ses muscles se tendent aussi.
Quand le massacre vient,
Nous sommes ses messies.
Que reste-t-il après ?
Je ne me tourne jamais…

Brave bête…

CHAPITRE 3 : Sheejhaumn entend des voix...

Un hurlement lugubre
Déchire la nuit, encore
Tout comme si ce pays,
Sinistre, froid, maudit,
Sentait venir la mort
Et moi dans la pénombre.

Cette nuit encore, mon sommeil est agité. Je pressens une épreuve. mon compagnon carnassier a perdu l'appétit. Les batailles se font rares, les proies plus encore. Cette terre est stérile. Dans la plaine asséchée, nos pas se suivent depuis des jours, et se dessine un unique sillon, balafre impertinente sur l'étendue de néant.

Des murmures dans ma tête
Tentent de me rendre folle.
Il faut faire taire ces voix,
Elles me mettent hors de moi !
Même lorsque je somnole,
Jamais elles ne s'arrêtent.

Les dieux déchus m'appellent, des tréfonds de leur tombe. Ils se meuvent dans le noir, m'attirent dans les abysses. Qu'ils y croupissent encore, dans leurs ténèbres mortuaires : l'Oblivion les retient, trou de noirceur sans fond d'où s'échappent ,discontinus,leurs plaintes et leurs chants.

Comme un appel sans fin,
On me dit où aller.
Je ne sais d'où je viens,
On me presse d'avancer,
De toujours me hâter,
Pour savoir mon destin.

Les voix se font plus fortes, les paroles plus claires. Ils veulent me révéler le secret que je cherche, me dire où frapper pour comprendre ma Voie. Ivre de leurs incessantes incantations, je titube sur les chemins. Les adversaires que j'affronte s'effondrent dans la douleur et le sang est partout.

Les faibles sont légion, mon esprit s'interroge.
Je regarde le monde et je saisis ma hache.
si je tranche dans le vide, mes rêves se détachent,
Mes cauchemars prennent vie, déferlent dans cette auge
Où pataugent les gueux, et je reste interdite,
Me demandant pourquoi je suis là, seule, maudite...

Alors, je ne sais comment, sans prononcer un mot, ils ont dans mon esprit imprimé ces paroles : "Les dieux de ce monde-là, ceux qui règnent aujourd'hui, t'ont volé ta couronne, t'ont déchu de ta place. Et toutes ces créatures qui gisent dans ton sillage ne sont rien que des êtres qui te sont inférieurs, ou encore des chimères créées pour te tromper... Tu viens d'un autre plan, et tes fourbes ennemis sont enfouis en un lieu dont tu n'as pas idée. Il te faudra trancher dans le ciel lui-même pour trouver ton chemin."

Le sang appelle le sang.
La mort appelle la mort.
Si j'accepte mon sort,
Je reconnais mon rang.
Le monde est à mes pieds,
Les Dieux à renverser !

Braves bêtes...

1 commentaire:

  1. Bonjour,


    Je viens de passer une heure ou deux sur votre site, rencontré par hasard, et je suis assez fasciné. Vous me semblez un peu torturée mais vous ne manquez pas de talent. Vous me faites penser à moi il y a quelques années. Et je suis persuadé qu'avec le temps, vous allez finir par trouver cette sérénité que vous regrettez comme un paradis perdu ; elle n'est pas derrière vous, elle est devant. ;-)

    Donc, c'est bien de s'investir dans l'écriture quand on a un ton et un style, mais il ne faut pas oublier qu'il y a des gens dans la rue, des oiseaux dans les arbres et du soleil à travers la fenêtre... ;-)

    Courage ! Vous êtes douée ; vous y arriverez ! Avec un peu de recul... ;-)

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